La rentrée, c’est ce moment magique où l’on ressort les agendas, où l’on promet de lire plus et… où l’on finit par scroller des bandes-annonces à 2×. Mauvais plan. Cette semaine, Intervistar remplace vos bonnes résolutions par une meilleure habitude : nous lire. Pourquoi ? Parce qu’on vous fera gagner du temps, du fun et du capital cinéphile. On vous offre une dose de soleil en plus avec un focus sur l’Espagne, ses cinéastes et ses séries. L’Espagne, c’est le seul pays où l’on peut passer d’une orgie visuelle à Cannes à une comédie de voisinage sur Netflix, sans jamais perdre le goût du panache. Cette rentrée, Intervistar fait le pari ibérique : on vous embarque dans un voyage entre fiesta, frissons et feu sacré.
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Pourquoi il faut absolument voir Sirât
Vous avez entendu trop de superlatifs sur le film pour y croire. D’autres en sont sortis assommés, presque désabusés. Et pourtant, c’est le film de la rentrée. De ceux auxquels on repense toute l’année. Dans Sirât, Óliver Laxe nous embarque dans une quête intérieure et sensorielle déroutante : un père et son jeune fils traversent le désert marocain, à la recherche de leur fille et soeur disparue au cœur d’une rave, et plongent dans une odyssée qui devient autant spirituelle que physique. Le film, présenté en compétition officielle à Cannes 2025, y a été récompensé du Prix du Jury, confirmant l’ampleur de son impact. Ce qui frappe dès les premières images, c’est la manière dont Laxe fait du désert et des fêtes techno clandestines plus qu’un décor : un écrin pour un film radicalement sensoriel. La photographie immersive de Mauro Herce et la bande-son électro énigmatique de Kangding Ray vous saisissent dès les premières notes, transformant la séance en véritable transe collective. Sirât n’est pas seulement un objet esthétique – un voyage hallucinant à travers le son, l’image – c’est aussi une réflexion profonde sur la modernité, la crise climatique et le besoin d’alternatives et le désarroi humain. Óliver Laxe confirme avec cette œuvre sa singularité en tant que créateur visuel et sonore, prêt à repousser les limites et à bouleverser ceux qui s’aventurent dans son univers. Et vous qu’est-ce que vous en avez pensé? Dites-le nous en commentaire.
Si vous voulez prolonger l’ambiance à l’écran, le cinéma Le Pestel à Die vous propose de poursuivre la soirée avec un DJ set d’électro le 19 septembre.
D’autre part, le cinéma les 3 Luxembourg à Paris a l’excellente idée de programmer la première fiction d’Oliver Laxe, Mimosas, la voie de l’Atlas, Grand Prix de la Semaine de la Critique 2018. Séances les 18, 20 et 23 septembre.
Plongez dans l’univers de Cervantès
Qui était Miguel de Cervantes avant Don Quichotte de la Manche , c’est la question à laquelle a tenté de répondre Alejandro Amenábar dans un film lyrique et ambitieux. Cervantès avant Don Quichotte plonge dans ces cinq années charnières que l’écrivain passa en captivité à Alger, pendant lesquelles il survécut à la peur, à l’incertitude, aux tentatives d’évasion. Le film met en avant la narration comme arme de survie.
Ce film n’est pas un manuel d’histoire académique. Il prend des libertés dramatiques, acceptables pour peu qu’on soit prêt à entrer dans une fiction qui se nourrit de ce qu’on sait moins, de ce que l’on suppose.
Et si vous brulez de découvrir le film avant sa sortie le 1er octobre, l’Unipop Arts, Littérature et Cinéma organise le 18 septembre, l’avant-première du film. La projection sera suivie d’une conférence « Cervantès. Expliquer le mystère ? » animée par Pierre Darnis. Deux séances sont proposées, à 15h45 et 20h30, avec un tarif réduit pour les inscrits (6,50 €).
Unipop, qu’est-ce que c’est?
Unipop est une initiative culturelle portée par le cinéma Jean Eustache et le Festival du Film d’Histoire de Pessac — un espace de partage où le spectateur curieux se connecte avec le film non seulement comme divertissement, mais comme lieu de sens, de découverte, de confrontation d’idées. “Chaque Unipop propose des projections, rencontres, conférences ou débats, autour d’œuvres cinématographiques, souvent accompagnés de spécialistes, explique Alix Daul, coordinatrice de l’Unipop Arts et littérature. Notre programme est défini à l’avance. Nous organisons aussi beaucoup d’avant-premières.” Les intervenants sont filmés en direct.
Car l’événement ne s’arrête pas là : il s’inscrit aussi dans le dispositif Unipop de ville en ville, qui permet à plus de 70 salles partenaires à travers la France de vivre, le même jour, la même expérience de la projection suivie d’une rencontre. Autrement dit, si vous n’êtes pas à Pessac, vous pourrez tout de même participer à l’aventure dans des cinémas indépendants proches de chez vous. Parmi les salles participantes : Le Cinéma Comoedia à Sète, Le Cinéma Carnot à Ussel, Le cinéma Eldorado à Saint-Pierre d’Oléron.
Le film est aussi à découvrir en ouverture de la saison de l’Association semaine du cinéma hispanique au cinéma Le Capitole de Clermont-Ferrand le 17 septembre.
Deux séries espagnoles qui bousculent le pouvoir
La fiction espagnole continue de se réinventer. Après avoir conquis le monde avec ses thrillers (La Casa de Papel, Antidisturbios), elle propose aujourd’hui des récits plus politiques et plus incarnés. Deux nouveautés en témoignent : Su Majestad (Prime Video) et Furia (HBO Max). L’une choisit la satire de la monarchie, l’autre le cri social de femmes oubliées. Ensemble, elles dessinent une Espagne en colère, mais qui rit encore.
Su Majestad, est une satire mordante, servie par Anna Castillo dans le rôle de la princesse Pilar : une héritière volontairement éloignée de l’image compassée qu’on attend d’une figure royale. La monarchie est un décor, mais c’est l’Espagne elle-même qui est mise en procès.
Furia propose une autre forme d’audace. Les quatre interprètes, Carmen Machi, Candela Peña, Cecilia Roth, Pilar Castro et Nathalie Poza, incarnent chacune une facette de la rage féminine. Ensemble, elles forment un beau chœur tragique. Le scénario choisit de montrer des destins parallèles qui finissent par résonner ensemble, une véritable fresque émotionnelle.
Là où Su Majestad manie le rire corrosif, Furia brandit la colère comme arme esthétique. Deux langages, deux tonalités, mais une même ambition : parler de l’Espagne d’aujourd’hui, entre institutions fragilisées et invisibilisation sociale.
Toulouse célèbre le cinéma espagnol
Cap sur Toulouse pour vivre un automne caliente avec le meilleur du cinéma espagnol du 6 au 12 octobre. Sous la codirection de Loïc Diaz Ronda et Alba Paz Roig, Cinespaña s’est enrichi de cycles thématiques en partenariat avec la Cinémathèque de Toulouse, de nouvelles sections, et d’un hommage aux grandes figures du cinéma espagnol.
3 questions à Loïc Diaz Ronda, co-directeur du Festival
Qu’est-ce qui caractérise le cinéma espagnol aujourd’hui?
Depuis le milieu des années 2000, l’Espagne a fait murir une nouvelle génération de cinéastes formée dans les écoles à Madrid, Barcelone mais aussi en régions (Pays Basque, Galicie). Ils font leurs armes dans le documentaire avec des comédiens non professionnels. Oliver Laxe n’est pas un cas isolé, il fait partie de cette nouvelle vague galicienne d’où est issu son chef opérateur Maura Erce ou Lois Patiño. Il y a aussi un rattrapage du côté de la parité.
On a définitivement tourné la page de la Movida?
Le cinéma est plus réaliste. Il y a énormément de films sociaux, sur les migrations, le problème du logement. Beaucoup de sujet aussi sur les rapports générationnels et les familles déstructurées.
Quels seront les temps forts de cette édition?
Nos sélections mettent en avant les 1er et 2eme long-métrages, des documentaires d’une qualité incroyable. Cette année, on plonge dans le futur avec le cycle Mutaciones : dystopies, cyborgs et science-fiction ibérique, de Acción Mutante d’Álex de la Iglesia à La piel que habito d’Almodóvar. On y découvre aussi Cyborg Generation et The Human Hibernation, sans oublier les courts d’anticipation des années 60 découverts récemment. Une soirée spéciale Gala Hernández López (César 2024 du court documentaire) viendra questionner nos utopies technologiques.
Un talent à suivre: Guillermo Galoe
Ciudad sin sueño est le premier long métrage de fiction de Guillermo Galoe, et il surgit comme une voix neuve puissante dans le cinéma espagnol. Situé dans la Cañada Real, un des bidonvilles les plus vastes et méconnus d’Europe, le film raconte l’histoire de Toni, un adolescent Rom, tiraillé entre la nécessité de rester sur ses terres avec son grand-père et la tentation de partir vers un futur incertain. Il a remporté le Prix SACD du meilleur scénario , lors du dernier Festival de Cannes – Semaine de la Critique. Ciudad sin sueño est une expérience qui marque et, surtout, ouvre les yeux. Le film est programmé durant tout le mois de septembre au cinéma du Panthéon à Paris.
Rapprocher la France de l’Espagne
Tel est le but du Festival Ciné Francès de Malaga initié par l’Alliance Française. devenu en trois décennies un événement incontournable qui mêle avant-premières, rencontres, documentaires, courts-métrages et débats. Alors si vous avez la chance d’être en Espagne ou si vous voulez vous offrir un week-end au soleil, foncez à Malaga. Du 10 au 17 octobre, avec une programmation qui reflète toute la diversité et la vitalité du cinéma d’expression française qui rassemble près de 15 000 spectateurs, des invités prestigieux, et des projections dans les lieux emblématiques de la ville – du Cine Albéniz au Centre Pompidou Malaga – et ses séances scolaires qui accueillent chaque année des milliers d’élèves andalous, le festival affirme une vocation culturelle et pédagogique forte : rapprocher la France et l’Espagne par le cinéma. L’Alliance Française accueille également une exposition de photographies de Christophe Brachet, prises lors du tournage de la série Zorro (2024) avec Jean Dujardin. Ces clichés dévoilent à la fois les paysages mythiques du désert d’Almería et les coulisses d’une production internationale d’envergure, tournée dans le village d’El Chorrillo.
Marseille : le cinema espagnol au féminin
Du 7 au 18 octobre 2025, Marseille et la Région Sud accueilleront la 24e édition de CineHorizontes, grand rendez-vous dédié au cinéma espagnol. Cette année, le festival met à l’honneur le cinéma espagnol au féminin, avec un hommage à Icíar Bollaín, marraine de cette édition, figure incontournable dont les films engagés ont marqué la critique internationale.
Au programme : une cérémonie d’ouverture le 7 octobre avec El 47 de Marcel Barrena, une masterclass exceptionnelle d’Icíar Bollaín, la projection de 5 de ses films, mais aussi 12 longs-métrages de nouvelles réalisatrices, une table ronde sur le cinéma au féminin, et une journée pédagogique.
Nos coups de coeur de la semaine
Au théâtre pour Hitchcock et Truffaut
Avec Que sera sera le collectif belge tg STAN transforme l’un des ouvrages les plus mythiques de la cinéphilie en expérience scénique. Hitchcock/Truffaut c’est l’interview par le jeune François Truffaut du maître du suspense, Alfred Hitchcock. Il l’interroge sur les ressorts scénaristiques de ses films, son obsessions pour les actrices blondes et ses choix de mise en scène. Ce face-à-face prend ici des allures de jeu d’acteurs, où l’admiration du disciple se confronte au génie pragmatique du maître. Mais le collectif tg Stan parvient a progressivement mettre l’oeuvre d’Hitchcock en rapport avec ce qui acceptable dans le cinéma aujourd’hui et souligne les travers du cinéaste un peu pervers. C’est drôle, brillant et jusqu’au 21 septembre au Theâtre du Rond-Point. Le spectacle est presque complet, mais ne désespérez pas une liste d’attente est ouverte sur place, une heure avant chaque représentation.
Au cinéma pour célébrer Pierre Richard
Pierre Richard, c’est plus qu’une figure du cinéma comique français : c’est une institution. Avec sa maladresse légendaire et ce charme désarmant, il a enchanté des générations — de Le Grand Blond avec une chaussure noire à La Chèvre, en passant par Les Fugitifs. Ses personnages, toujours un peu à côté de la plaque, nous rappellent la beauté du décalage, la tendresse du soulagement, le rire comme geste de résistance. Et derrière son rire se cache une sensibilité discrète : un regard sur le monde, sur l’amitié, sur les blessures du temps.
Avec L’Homme qui a vu l’ours qui a vu l’homme, il revient à la réalisation et mêle comédie et moments plus profonds où l’on réfléchit aussi à la différence, à l’amitié intergénérationnelle, à notre rapport à la nature. Un équilibre réussi entre fantaisie et réalisme dans la manière de filmer les petits gestes, les silences, la nature.