À la toute fin d’Autant en emporte le vent, Scarlett O’Hara, debout au milieu des ruines de sa vie sentimentale, lâche une phrase devenue légendaire : « After all, tomorrow is another day. » — « Après tout, demain est un autre jour. »
C’est peut-être la plus belle définition du cinéma. Un art qui, même quand il filme le désespoir, garde la caméra tournée vers ce qui vient. Le cinéma de demain, c’est un cinéma qui ose regarder l’avenir, non pas avec naïveté, mais avec cette rage de ne pas baisser les bras.
Le futur, au cinéma, n’est pas qu’une affaire de science-fiction. C’est aussi celui des nouveaux visages, des récits qu’on n’a pas encore osé raconter, des formats hybrides, des langues minorées, des mondes à réimaginer.
Dans un monde saturé d’écrans, où l’attention est un champ de bataille, le cinéma garde ce pouvoir unique : celui de projeter — au double sens du terme. Il nous jette vers l’avant, il nous pousse à croire que, même si tout s’effondre, demain reste une scène à écrire.
Et vous, quel film vous donne envie d’y croire encore ?
Une Nuit Blanche à rêver cinéma
Le 7 juin 2025, la Nuit Blanche offre aux cinéphiles une immersion inédite dans le 7ᵉ art, transformant la capitale en un vaste décor cinématographique. Sous la direction artistique de la réalisatrice Valérie Donzelli (La guerre est déclarée), cette édition célèbre le cinéma sous toutes ses formes. Voici une sélection des points forts de cet événement. La programmation complète ici.
1. Lumières sur l’île Saint-Louis
La cheffe opératrice Céline Bozon métamorphose l’île Saint-Louis en un décor onirique, mêlant brumes et lune monumentale, évoquant l’ambiance d’un plateau de tournage.
2. Projection de « Hôtel du Nord » au canal Saint-Martin
Redécouvrez le classique de Marcel Carné sur les lieux mêmes de son tournage, accompagné d’un concert de jazz, pour une expérience immersive unique.
3. Les murs au féminin
Des projections en plein air rendent hommage à six réalisatrices emblématiques, dont Alice Guy, Agnès Varda et Chantal Akerman, illuminant les façades parisiennes de leurs œuvres engagées.
4. 130 ans de cinéma au Petit Palais
Gaumont, en partenariat avec la Fémis, célèbre l’histoire du cinéma français avec des projections, performances et installations, dans un parcours immersif retraçant l’évolution du 7ᵉ art. Ne manquez pas la rencontre animée par la journaliste Guillemette Odicino avec des invités de renom tels que Michel Hazanavicius, Anne-Sophie Bailly, Lawrence Valin et Fanny Sidney. Ils partageront leurs souvenirs de cinéma, entrecoupés de courts-métrages signés par des anciens élèves de la Fémis, dont François Ozon et Sophie Fillières. La soirée se clôturera par une création musicale de Christophe Chassol et un DJ set de Para One.
5. Rêveries avec Michel Gondry
Plongez dans l’univers poétique de Michel Gondry avec un court-métrage d’animation (en papiers collés) réalisé spécialement pour la Nuit blanche et projeté sur le parvis de la gare Montparnasse. A Villejuif, le cinéaste installe son Usine de Films Amateurs : un dispositif participatif, gratuit et accessible à toutes et tous. Inspiré de son film Soyez sympas, rembobinez, ce projet invite les habitants à créer collectivement un court-métrage en 3 heures, depuis l’écriture du scénario à la projection, en passant par le tournage. Inscriptions en ligne.
6. Redécouverte de Chantal Akerman
Le Mémorial de la Shoah revisite l’œuvre de Chantal Akerman, croisant plusieurs dimensions, notamment biographiques, invitant à une introspection sur son œuvre marquante et avant-gardiste. Projections, installations, exposition.
7. Un parcours dans les Catacombes
Pour la première fois, Nuit Blanche investit les Catacombes de Paris et propose un parcours sonore poétique inédit.
8. Philippe Katerine voit la vie en rose
Le chanteur, comédien et plasticien métamorphose le Quartier Jeunes (ancienne mairie du 1er arrondissement) et promeut le “mignonisme”.
9. Des artistes aux 7 Parnassiens
Le cinéma indépendant les 7 Parnassiens accueille une programmation composée d’œuvres vidéo (Clément Cogitore, Valérie Mréjean, Emily Richardson…) et une exposition.
Coup de coeur de la semaine : Le répondeur
C’est la surprise des beaux jours! Le 4 juin, sort sur les écrans Le Répondeur de Fabienne Godet, une comédie inventive explorant les frontières de l’identité et de l’imitation. Adapté du roman éponyme de Luc Blanvillain, le film met en scène Baptiste (Salif Cissé), un imitateur talentueux peinant à vivre de son art. Sa vie bascule lorsqu’il est engagé par Pierre Chozène (Denis Podalydès), un écrivain célèbre souhaitant se libérer des appels incessants de son entourage. Baptiste devient alors sa voix au téléphone, s’immisçant progressivement dans la vie de l’écrivain. Denis Podalydès est parfait en écrivain replié sur lui-même tirant juste sur la mauvaise foi, tandis que Salif Cissé, impressionnant pour son premier grand rôle, rayonne d’une force calme et magnétique.
Salif Cissé, révélé dans À l’abordage de Guillaume Brac et diplômé du Conservatoire National Supérieur d’Art Dramatique, a suivi une préparation intensive de deux mois et demi pour ce rôle, travaillant notamment avec l’imitateur Michaël Gregorio pour maîtriser la voix de Podalydès. On l’avait repéré dans la mini série La fièvre sur Canal+ en hacker prêt à tout. Le comédien viendra à la rencontre du public le 7 juin à l’Ecran de Saint-Denis après une projection du film dans le cadre de la Nuit Blanche. Entrée libre sur réservation.
Le Répondeur a été couronné du prix du public au 28e Festival international du film de comédie de l’Alpe d’Huez, témoignant de son accueil chaleureux. A vous d’y aller! Dernières avants-première avec équipe le 2 juin à l’UGC Ciné Cité Les Halles, le mardi 3 juin au Pathé Wepler, et le jeudi 5 juin au Select d’Antony.
Sous les fleurs, les cicatrices : McQueen à Paris
On connait Steve McQueen le cinéaste (Twelve Years a Slave, Blitz), voilà l’occasion de découvrir l’artiste visuel. Avec l’exposition Bounty, présentée à la Galerie Marian Goodman à Paris jusqu’au 25 juillet, Steve McQueen revient exposer dans la capitale française pour la première fois depuis 2016. Cette série de 47 photographies met en lumière la beauté éclatante des fleurs indigènes de la Grenade, île caribéenne d’origine de ses parents. Au-delà de l’esthétique florale, McQueen propose une réflexion profonde sur l’histoire coloniale, le patrimoine antillais et la résilience face aux traumatismes du passé.
Bounty s’inscrit dans la continuité des œuvres précédentes de McQueen réalisées à Grenade, telles que Carib’s Leap (2002) et Ashes (2016), qui juxtaposaient des paysages idylliques à des récits tragiques. L’exposition est accompagnée d’une nouvelle œuvre inédite, enrichissant cette méditation visuelle sur la mémoire et l’identité. Une rencontre entre Steve McQueen et Hans Ulrich Obrist, directeur artistique de La Serpentine à Londres, est prévue le samedi 21 juin à 15h à la galerie.
L’avenir du ciné en mode tournée nationale
C’est là que se trouvent les talents de demain : La Semaine de la critique. Cette section parallèle du Festival de Cannes organisée par le Syndicat Français de la Critique de Cinéma, qui a révélé par le passé Jacques Audiard ou Guillermo del Toro, reprend la route pour vous faire découvrir les premiers et seconds films étonnants. A découvrir notamment L’intérêt d’Adam de Laura Wandel, Des preuves d’amour d’Alice Douard ou le Grand Prix de la Semaine: Pee Chai Dai Ka (A Useful Ghost) de Ratchapoom Boonbunchachoke. A Paris, à La Cinémathèque française, à la Cinémathèque de Corse, au Rialto à Nice ainsi que dans les cinémas La Baleine et Les Variétés à Marseille, ne loupez pas les reprises de la Semaine à partir du 3 juin, en présence des équipes des films.
Demain, c’est elles
Le Festival du Film de Demain est un nouveau rendez-vous culturel dédié aux films engagés créé en 2022. Il revient pour sa 4ᵉ édition du 4 au 8 juin 2025 au Ciné Lumière de Vierzon. L’occasion de passer une belle fin de semaine pas loin des châteaux de la Loire.
La compétition officielle présente huit longs-métrages inédits, dont sept sont réalisés par des femmes. Parmi eux, Les rêveurs de et avec Isabelle Carré, Sorry Baby d’Eva Victor et Aux jours qui viennent de Nathalie Najem.
Le festival s’ouvre avec Moi qui t’aimais de Diane Kurys, une étonnante évocation de la relation entre Simone Signoret et Yves Montand. Il se clôture avec 13 jours, 13 nuits de Martin Bourboulon, mettant en vedette Roschdy Zem et Lyna Khoudri. Au programme également des rencontres avec des personnalités comme Cédric Klapisch, Lucien Jean-Baptiste ou la présidente du jury Anouk Grinberg.
Le futur, c’est flippant (et signé Danny Boyle)
Danny Boyle se prêtera à un question-réponse avec les spectateurs parisiens lors d’un évènement unique ! Avant la sortie de son nouveau film 28 ans plus tard, le réalisateur assistera mercredi 4 juin à 19h30 au MK2 Bibliothèque à une projection du premier film de la saga, 28 jours plus tard . Il y dévoilera des extraits exclusifs de 28 ans plus tard, avec Aaron Taylor-Johnson, Jodie Comer et Ralph Fiennes. Interdit aux moins de 16 ans, cette suite s’annonce aussi effrayante que les films précédents.
Deux visions du chaos intérieur
Deux films marquants à l’affiche cette semaine : Cloud de Kiyoshi Kurosawa, un thriller contemporain sur les dérives du capitalisme numérique, et Freud, la dernière confession de Matt Brown, un huis clos intellectuel explorant les tensions entre science et foi.
Dans Cloud, Kiyoshi Kurosawa (Cure) dépeint la descente aux enfers de Ryôsuke Yoshii, un revendeur en ligne peu scrupuleux qui s’attire la colère de clients floués. Critique du consumérisme numérique, Cloud est un thriller intense qui explore les conséquences de l’anonymat en ligne.
Freud, la dernière confession met en scène une rencontre fictive entre un Sigmund Freud à la fin de sa vie (Anthony Hopkins) et l’auteur chrétien du Monde de Narnia, C.S. Lewis (Matthew Goode) à Londres en 1939. Porté par des performances remarquables, ce huis clos offre une réflexion profonde sur les convictions humaines. Une avant-première du film est prévue le 3 juin au MK2 Odéon suivie d’une conférence sur le thème: Psychanalyse et religion, une entente possible?
James Gray décrypté
Two Lovers, La nuit nous appartient, Little Odessa… James Gray est le cinéaste de la désillusion américaine. L’ historienne du cinéma, Gabriela Trujillo, explore l’œuvre du cinéaste américain dans son essai James Gray – Sous le signe de Saturne, (éditions Capricci) mettant en lumière des thèmes récurrents tels que la figure du père dévorant et les promesses non tenues de l’Amérique contemporaine. Rencontrez-là le mardi 3 juin à 19h à la Librairie Compagnie (Paris 5e) puis à 21h, en face, à la Filmothèque du Quartier Latin pour la projection de la version director’s cut de The Yards, le mercredi 4 juin à la Librairie Le Square à Grenoble, le vendredi 13 juin à la librairie Le Delta (Paris 6e) et le vendredi 27 juin à la Bibliothèque Georges-Brassens (Paris 14e).
Robert Guédiguian à La Filmothèque
Une retrospective Robert Guédiguian en sa présence! Du 4 au 10 juin, la Filmothèque du Quartier Latin invite le réalisateur. Il présentera Marius et Jeannette, Ki lo sa ?, et La Ville tranquille et donnera une leçon de cinéma après la projection des Neiges du Kilimandjaro. Pour sa carte blanche, le 8 juin, le cinéaste présente Tous les autres s’appellent Ali de Werner Fassbinder, écho aux thématiques sociales et engagées qu’il aborde dans ses œuvres.
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